dimanche 25 juin 2017

Avoir un bébé : ma critique et quelques autres considérations de haut vol

I'm back ! Ce blog était plus ou moins à l'abandon depuis décembre dernier, après la naissance de mon fils (ça me fait encore tout drôle d'écrire cette phrase), mais je m'étais promis de reprendre sérieusement une fois qu'il aurait 6 mois. Avec 285 brouillons de billets qui s'entassent, il était grand temps. Comme c'est mon habitude, je vous propose ma critique de l’événement, assortie de quelques considérations stratosphériques sur le nonsense de la vie, les bilans énergétiques négatifs, les parasites et les vampires. Voici donc le premier billet post-apocalyptique de Sweet Random Science, un billet d'humeur avant de revenir à la science. Bonne lecture :)

Ma critique 

Après LEGO The Batman Movie, c'était LA grosse sortie de la fin d'année 2016, du moins en ce qui me concerne. J'avais eu des places en avant-première grâce à une copine, et je pense qu'elle m'aurait un peu fait la tronche si je ne m'étais pas pointé le jour J. C'est vrai que j'étais super bien placé, ça aurait été con de louper ça.

L'histoire 

Probablement l'histoire la moins originale du monde, après celle d'Independance Day : resurgence. Mais on a beau la connaître par cœur, on est rapidement pris dans le feu de l'action. Tourné à la première personne, le film donne immédiatement une perspective nouvelle aux événements, si élémentaires soient-ils. La mise en scène est criante de vérité, on s'y croirait, le moindre détail semble tout droit sorti d'un véritable bloc opératoire. Dr House peut aller se faire fabriquer un pommeau de canne. Je ne m'attarde pas trop sur cet aspect, mais je citerai un passage qui illustre bien cette minutie obsessionnelle dans la mise en scène : le moment où le père, à qui on tend le nouveau-né, s'en saisit avec un mélange d'émotion et de dégoût, à cause du vernix caseosa, une sorte de cire répugnante qui recouvre la peau du bébé et le protège du liquide amniotique ainsi que de l'air ambiant. Quand j'ai entendu le nom pour la première fois, je me suis dit que ça ferait un super nom de sort pour Harry Potter :

"Vernix Caseosa !" Le nouveau-venu se trouva instantanément enduit d'une substance cireuse.

"Damnation et méconium !" maugréa-t-il, "Le PH de ma peau est stabilisé ! Je t'aurai un jour Hairy Pater !"

Les acteurs 

Le gros plus du film, c'est le rôle de leur vie. J'ai voulu faire une interview de la tête d'affiche, mais je pense qu'il avait un peu forcé sur le biberon, parce qu'on entrave que dalle. Il finirait comme Macaulay Culkin ou Jordy que ça ne m'étonnerait pas.

Faut-il avoir un bébé ?

La réponse est non.

Non je déconne. Enfin pas vraiment. Si vous chérissez un tant soit peu votre liberté, votre temps libre et votre sommeil, passez votre chemin. Cette expérience est incompatible avec le maintien d'une vie normale, dans les premiers mois tout du moins. Ajoutez à cela, le bruit et l'odeur (oui je sais, je case cette citation de Chirac un peu trop souvent). En revanche, si vous avez des horaires type service d'accueil téléphonique d'un service publique (10h - 11h30 / 14h - 16 h), que vous n'avez aucune activité sociale, que dormir comme un skipper en haute mer ne vous pose pas de problème particulier et que vous avez du mal à dépenser tout votre argent, vous pouvez tenter l'aventure. Encore faut-il en avoir envie bien sûr. Attention, car la nature est bien faite : une fois arrivé, le bébé monopolise votre empathie et vous être pris dans un piège affectif (je reviens sur cet aspect juste après). Evidemment, ça vaut le coup, mais comme pour un service d'accueil téléphonique d'un service publique, choisissez le bon moment.

Energies non-renouvelables

Je ne sais pas si les bébés étaient représentés à la COP21, mais ils y connaissent tchipette en développement durable. Ces sagouins vous pompent littéralement votre énergie, sans aucune perspective de compensation. Enfin si, ils sourient et rigolent au bout de quelques mois, ce qui a le pouvoir surnaturel de gommer de la mémoire nuits blanches et frustrations en tout genre. Mais entre la multitude de fournitures à usage unique et l'énergie investie, leur bilan carbone est désastreux. Il parait qu'on perd 44 nuits de sommeil dans la première année. 44 nuits que vous ne récupérerez jamais. JAMAIS.

Le bilan économique est tout aussi foireux : si vous cherchez un nom adéquat, appelez votre gamin Kerviel Jr ou Madoff. Accueillir un bébé nécessite d'investir dans du matériel, une nounou, du lait parfois vendu au prix de la coke, et des petits pots insipides mais rehaussés en euros. Ces dépenses s'accompagnent parfois d'autres frais plus conséquents : nouvelle voiture, changement d'appart, consultations psychiatriques etc. Au total, les parents dépensent entre 1 500 et 4 000 euros la première année. Et c'est sans compter tous les achats inutiles auxquels succombent de nombreux parents, poussés par l'industrie qui tire sur la corde sensible.

Le cerveau en guimauve

Comment se fait-il que ce lent suicide biologique et social apporte autant de joie ? Comment la nature s'y prend-elle pour que nous soyons aussi heureux de mourir ainsi à petit feu, une fois le témoin génétique refilé à la génération suivante ? Côté maman, on ne sera pas surpris d'apprendre que le cocktail d'hormones joue un rôle majeur dans l'envie d'un bébé et l'acceptation de le porter, au détriment de la santé mentale et physique. Mais les choses ne s'arrêtent pas là : son cerveau subit lui aussi des modifications. Sans que l'on sache exactement pourquoi ni comment (on privilégie quand même l'hypothèse d'un déclencheur hormonal), on observe une diminution notable du volume de matière grise, associée à des restructurations spécifiques. En mesurant le volume de substance grise, on est même en mesure de dire si une femme a déjà eu une grossesse ou non ! Ces changements auraient pour but d'optimiser la relation mère-enfant, comme on peut le lire dans cet article du blog Le monde et nous.
La substance grise dans le cerveau. Source : democritique.org
Encore plus extraordinaire : le cerveau du père serait lui aussi concerné, dans une moindre mesure, par ces changements qui développent son sens de l'empathie. Si le papa n'en avait rien à cirer des babillements de babies avant d'avoir un bébé, il se découvre curieusement sensible lorsqu'il accueille son propre bébé, allant jusqu'à essuyer une larme en regardant le Roi Lion. Cette altération du niveau d'empathie intervient parfois même pendant la grossesse. On peut en apprendre davantage en lisant cet autre article passionnant, toujours sur le blog Le monde et nous. Je ne citerai personne, mais il arrive même que des papas sur-empathiques connaissent des épisodes de montées de lait !

Un parasite machiavélique 

Ces manipulations machiavéliques ne feraient-elles pas du fœtus le parasite le plus abouti de l'Homme ? Certes, ils font partie de la même espèce (j'ai des doutes parfois), mais le premier manipule sournoisement le second, en lui soutirant toutes les ressources dont il a besoin, tout en le gardant en vie. Plus fort que Toxoplasma gondii et taxaplaya balkanii réunis, le fœtus parvient même à pérenniser ce détournement de fonds jusqu'à 30 ans après avoir quitté son hôte. Et dire qu'il peut lui-même être "parasité". Dans certains cas extrêmement rares de grossesse multiple, l'un des fœtus peut absorber l'autre, si celui-ci arrête de se développer. Le fœtus vivant se développe alors normalement, mais porte quelque part en lui l'embryon de son jumeau/jumelle décédé-e. Ce "tératome" passe souvent inaperçu, mais selon sa taille et son emplacement, nécessite parfois une intervention chirurgicale. En 2015, une femme de 26 ans a été opérée pour retirer ce que l'on pensait être une tumeur au cerveau. Il s'est avéré qu'il s'agissait de son jumeau embryonnaire, qui contenait des ébauches de tissus osseux, dentaires et capillaires. Sympa, je vous épargne les images. Cette plongée dans le gore m'amène à mon point suivant.

Le mythe des vampires

Pâle comme un irlandais sur une plage australienne et nocturne par esprit de contradiction, le bébé draine littéralement vos ressources et votre énergie, après être venu au monde dans le sang et la douleur. Ça ne vous rappelle rien ? Bon sang (ha ha ha) mais c'est bien sûr : le bébé est l'archétype du vampire ! Et dire que certains y ont vu une projection de notre ancestrale peur de la mort, de nos pulsions sexuelles ou encore de nos blessures psychologiques enfouies..  Billevesées ! Et le parallèle ne s'arrête pas là : ces dents qui pointent douloureusement, annonçant une transformation du régime alimentaire trouvent un écho troublant chez les nosferatu. Et le linceul, dans lequel les premiers vampires se drapaient, et qu'ils mastiquaient à l'occasion, n'est-il pas le lange que le nourrisson porte si volontiers à la bouche ? Quant au fait que le vampire ne se reflète pas dans un miroir : est-ce une façon d'illustrer le fait que le nourrisson ne s'y reconnaisse pas ? Dans certaines cultures, un corps non traité à l'eau bouillante devient un vampire. Une référence aux linges et à l'eau bouillante longtemps utilisés lors des accouchements ? Ailleurs, les vampires sont décrits comme "rougeots et gonflés", qualificatifs que l'on peut tout à fait attribuer à la plupart des nouveau-nés. Ajoutez à cela le fait que le bébé rechigne à boire du jus d'ail et il n'y a plus l'ombre d'un doute : si le mythe du vampire est ancré de façon universelle dans la culture humaine, c'est qu'il traduit le double traumatisme de la venue au monde pour l'enfant et de l'accouchement pour la mère. Le vampire est le symétrique radial du bébé, partageant avec celui-ci certains traits notables mais diamétralement opposé sur d'autres : là où le bébé a la vie devant lui, le vampire n'a que la mort..  Quoique, le mot "couffin" sonne étrangement comme "coffin", le mot qui désigne le cercueil en anglais. De toute façon, c'est trop tard, je suis mordu, je l'aime déjà trop. Et quoi qu'il advienne, je lui interdirai Chica Vampiro !


C'est tout pour cette fois, promis, la prochaine fois, on parle science ! Pour apprendre plein de choses au sujet des relations bébé/parents, je vous conseille la page "Petit d'Homme" sur le blog Le monde et nous encore une fois. Et bien sûr, le Café des sciences regorge de ressources sur ce sujet, comme ce billet sur ce que voit le bébé. J'en profite aussi pour signaler l'excellent livre Comment éviter de se fâcher avec la terre entière en devenant parent ? de Béatrice Kammerer et Amandine Johais.

Je vous laisse avec un gif d'un chimpanzé qui déchire un test de mémorisation/classification. Jusqu’à environ six mois, certaines aptitudes, notamment celles basées sur la vue, sont en effet plus développées chez les autres primates que chez l’Homme : ils comptent plus rapidement, ont une meilleure mémoire des formes et des couleurs et appréhendent l’espace et les objets plus facilement. Un primatologue japonais a même montré que les performances d’un singe à un test de mémorisation rapide étaient largement supérieures à celles d’un groupe d’étudiants ! Idem lorsqu'il s'agit de classer, dans l'ordre, des chiffres qui s'affichent de façon aléatoire sur un écran.


Da sources :

La page "Petit d'Homme" du blog Le monde et nous
La page wiki des vampires
Une source quelconque concernant le coût d'une première année avec un bébé
Un lien en anglais sur cette histoire de 44 nuits perdues